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Changer ses modes de management pour fidéliser les talents en 2021

12 Oct • par le collectif émancipio

La question de l’engagement des collaborateurs est un sujet clé pour les entreprises, car tout recrutement représente un investissement en temps et en argent pour une organisation.  

Ces dernières années, les motivations des collaborateurs à s’engager dans leur organisation ont été bouleversées par plusieurs facteurs. Deux facteurs en particulier doivent être considérés par toute organisation souhaitant attirer de nouveaux talents et les fidéliser :  

  • Le premier est la crise du Covid qui a accéléré la mise en place du télétravail dans de nombreuses organisations.  
  • Le second est l’évolution des attentes et sources de motivation des collaborateurs au travail. Si ces nouvelles attentes semblent incarnées par la Génération Z (nés entre 1995 et 2010), elles sont loin de ne concerner qu’eux. Il s’agit bien là d’un mouvement de fond du rapport au travail qui concerne l‘ensemble de la société.   

1. Un bouleversement des pratiques et des attentes  

La crise du Covid et les confinements successifs associés ont forcé les organisations à repenser l’organisation du travail. Selon le baromètre annuel télétravail réalisée par Malakoff Humanis en 2021, le télétravail est encore plébiscité par un grand nombre de salariés avec seulement 14% d’entre eux qui disent ne plus souhaiter télétravailler après la crise sanitaire. L’option 100% télétravail n’est pas non plus plébiscitée, on lui préfère un rythme de 2 jours par semaine, laissant place à une organisation du travail hybride entre télétravail et présentiel (1) . Ces nouvelles pratiques doivent être accompagnées d’une réflexion sur les modes de coopération, de travail d’équipe et de rapport au management.  

Plus préoccupant, l’état psychologique des collaborateurs s’est significativement détérioré pendant la crise sanitaire : en mars 2021, le cabinet d’Empreinte Hu­maine, spécialisé dans la prévention des risques psychosociaux et la qualité de vie au travail, chiffre à 45% la proportion de salariés souffrant de détresse psychologique. En conséquence, les salariés ont revu leurs priorités au travail. Au printemps 2020, 81% des salariés font du bien-être au travail un enjeu prioritaire, contre 56% en 2018 (2) 

Un autre facteur incitant à repenser l’organisation du travail est l’arrivée dans le monde du travail de la génération Z, qui rassemble les personnes nées entre 1995 et 2010. Cette génération exprime des attentes particulières en ce qui concerne les modes de management et les modes de travail, comme l’explique Elodie Gentina, enseignante-chercheuse à l’IESED School of Management et spécialiste de la Génération Z (3). Alors que l’entreprise représentait auparavant un lieu où l’on échange sa force de travail contre sécurité, salaire et perspectives de carrières, son rôle attendu glisse aujourd’hui vers un modèle plus centré sur l’éducation et l’épanouissement personnel : “l’entreprise est perçue comme une sorte d’école apprenante et partageante, pas comme un lieu de sacrifices”. Ainsi, la qualité des rapports interpersonnels devient centrale et détermine fortement la fidélité de cette génération à l’organisation dans laquelle ils travaillent ; il est essentiel que les relations d’équipe permettent l’épanouissement professionnel et personnel de chacun. Il en découle naturellement de nouvelles attentes quant au management : à un management directif perçu comme aliénant se substitue un management proche du coaching, centré sur l’écoute, la confiance et l’apprentissage mutuel. Nous verrons en quoi ces attentes vont dans le sens d’une organisation de travail collaborative.  

L’envie de travailler autrement, de manière plus collaborative est bien présente chez d’autres populations que la génération Z, comme le montre l’étude LinkedIn, publié en 2017, sur “l’attraction des talents” – Comment les salariés les plus performants recherchent-ils un emploi ? » (4). Ainsi Arnaud Devigne, Directeur Général Indeed France, explique que 47% des talents « sont prêts à rejoindre un autre employeur pour bénéficier d’un environnement de travail plus inspirant et où règne la collaboration ». Ce dernier met en avant l’envie des collaborateurs, au-delà de ceux de la Génération Z, d’avoir accès à un fonctionnement en mode projet dans lequel ils peuvent travailler en collaboration avec d’autres métiers que le leur, mais également, comme leurs collègues plus jeunes, d’avoir plus une relation de coaching avec leurs managers que de contrôle.  

2. La réponse du collaboratif 

Les démarches collaboratives ne sont pas des solutions de teambuilding ni de knowledge management, contrairement aux idées reçues. Leur raison d’être est de permettre la résolution de problèmes complexes (cf. notre article L’intelligence collective ou comment gérer la complexité d’une organisation).  

Néanmoins le sentiment d’appartenance au collectif et la bonne qualité des relations interpersonnelles sont à la fois des conditions nécessaires à la pratique efficace du collaboratif et des conséquences de cette pratique. 4 raisons à cela :  

  • Pour collaborer il faut d’abord que le groupe tende vers un objectif commun et considère les mêmes enjeux. Si chacun est dans une posture de défense de ses intérêts personnels, rien de productif ne pourra émerger de l’échange.  
  • A l’issue de quelques séances, le groupe sera lié par une compréhension partagée (un modèle mental commun) de la problématique et des enjeux qui auront été construits sur la base des expertises et expériences de chacun.  
  • Une fois la problématique complexe résolue, les participants seront liés par la solution à laquelle ils ont collectivement abouti et consenti, et dont ils sont solidairement responsables.  
  • Finalement, ils sont liés par un rapport d’égalité et de reconnaissance active de cette égalité (de participation, de pouvoir de décision). Ainsi le collaboratif est un excellent moyen d’expérimenter de nouveaux rapports avec sa hiérarchie, puisque le rapport d’autorité est momentanément écrasé par le cadre collaboratif. Cela facilitera la transition ensuite, d’un management directif vers une posture de manager coach, grâce au lien de confiance qui aura pu se développer.  

Rassurez-vous, le collaboratif n’efface pas pour autant les individualités ; au contraire afin d’éviter l’écueil de la pensée de groupe, il est essentiel que chacun garde son indépendance d’esprit.  

Ceux pour qui l’organisation doit être un lieu d’apprentissage continu y trouveront également leur compte ; puisqu’il s’agit d’aboutir à un modèle mental commun, chacun doit continuellement enrichir sa propre compréhension avec celle des autres. Si vous partez du principe que vous avez déjà tout compris et que vous n’avez rien à apprendre des autres, vous ne ferez rien émerger du collectif. Les participants à un atelier doivent en ressortir différents, enrichis, avec une compréhension plus nuancée, plus décentralisée, et finalement plus complexe, des enjeux. Un ingénieur aura peut-être appris quelle est l’utilité de la perspective RH sur une problématique qu’il voyait à travers des lunettes d’ingénieur, donc sous un angle qui ne considère pas nécessairement la psychologie comme un facteur pertinent. Le collaboratif favorise aussi le développement de certains savoirs-être essentiels au bon fonctionnement d’un échange collaboratif : écoute active, bienveillance, non jugement, empathie font partie des postures essentielles pour garantir un échange harmonieux et génératif. Ces ateliers sont la meilleure occasion de développer chez vos collaborateurs l’habitude d’adopter ces postures tout en expérimentant concrètement leurs bénéfices en matière de productivité et de développement personnel.   

Les confinements successifs ont aussi amené leur lot d’innovations dans les approches collaboratives. Durant cette période et pour s’adapter à l’accroissement de la part de salariés en télétravail, les approches collaboratives se sont mises au distanciel avec de l’animation d’atelier 100% à distance. Les techniques développées pour l’animation de ces ateliers à distance, sans égaler les travaux en présence, permettent toutefois de tisser des liens forts entre participants. 

3. Les avantages en termes de dynamique RH  

Ces approches collaboratives génèrent aussi une vraie valeur ajoutée à amener en termes de dynamiques RH pour les individus. 

Une étude dévoilée par LinkedIn en janvier montre qu’au niveau mondial, les compétences comportementales les plus recherchées par les organisations sont : la créativité, la persuasion, l’esprit d‘équipe, l’adaptabilité et l’intelligence émotionnelle.  

Les approches collaboratives permettent de développer toutes ces compétences : nous avons déjà démontré son apport en matière de cohésion, de créativité et d’adaptabilité. La capacité de persuasion est développée indirectement ; il s’agit moins de persuader le groupe que de retenir uniquement les postures qui ont été argumentées. C’est ensuite par l’étude partagée et rigoureuse de cette posture, mise en relation avec toutes les autres, que le groupe travaille à se convaincre lui-même de sa validité ou de son invalidité. Quant à la dernière des compétences les plus prisées, de multiples études ont démontré que l’intelligence collective est fortement dépendante de l’intelligence émotionnelle des individus (plus, d’ailleurs, que de leur QI individuel) (Emile Servan-Schreiber, Supercollectif). C’est en effet une condition nécessaire à la conduite d’échanges fluides et respectueux au sein du groupe.   

Les approches collaboratives permettent également un enrichissement des parcours professionnels, en ce qu’elles sont l’occasion pour le collaborateur de s’ouvrir à des expériences et expertises différentes de la sienne et de prendre conscience de la diversité de possibilités d’évolution qui s’offrent à lui.  

Enfin, ces approches permettent d’activer de nouvelles formes de reconnaissance et de valorisation du collaborateur. Si la reconnaissance financière avec le niveau de salaire et les primes est toujours citée comme un facteur de motivation important pour les collaborateurs, d’autres types de reconnaissance peuvent venir le compléter. Elodie Gentina parle de “reconnaissance existentielle” et de “reconnaissance intégrative”. La première découle de l’écoute et la confiance qui existent entre un manager et son équipe. C’est une reconnaissance du collaborateur en tant qu’être humain, et elle passe par des actions aussi simples que le saluer, le consulter sur les sujets qui le concernent, le tenir au courant des décisions prises, etc. Quant à la deuxième, la “reconnaissance intégrative”, il s’agit de permettre aux collaborateurs de contribuer à la transformation de l’organisation.